Nom de baptême : Marc Juge

(Extrait de Un siècle de mutualité policière 1905-2005, Roger Lejeune, Saint-Étienne, Dumas-Titoulet éditeurs, 2004 :)

Marc Roland Juge débute sa carrière en qualité de secrétaire de police à Moulins, puis entre à la Sûreté nationale comme inspecteur au contrôle criminel. Après son passage à l'école supérieure de police à Lyon, il revient à Vichy  comme commissaire au sein de son ancienne direction en octobre 1942. Parallèlement à l'activité à laquelle il se consacre pour le réseau auquel il appartient, il s'efforce de sauver les personnes recherchées par la Gestapo et de mettre hors d'état de nuire les agents, les indicateurs de la police allemande, de la Milice ou du Parti Populaire Français de Doriot. Il établit sur eux des dossiers très précis destinés à permettre des poursuites à la Libération. Dans l'immédiat, en les surveillant, il parvient à les faire condamner pour des délits de droit commun, peu contestables par les occupants. [...] Le 18 janvier 1944, le commissaire Juge est arrêté dans son bureau par des agents de Gessler, chef de la Gestapo, Il est transféré à la prison de Moulins et durement matraqué par Adam Essinger, l'un des plus durs inspecteurs de Vichy, assisté par le gardien Willie Armbruster, réputé lui aussi pour sa brutalité. L'un des témoins des tortures subies par Marc Juge, le prisonnier employé aux cuisines Pierre Lenclud, dira : "C'est un des rares que j'ai vu frappé et résister de la sorte."

 Le 24 mars 1944, avant d'être fusillé, il rédige à l'attention de sa femme et de son jeune fils une lettre exemplaire d'amour et de patriotisme dans laquelle il leur dit qu'ils peuvent continuer à marcher la tête haute, car il n'a rien à se reprocher.  Arrivé sur le lieu de son exécution, il entonne la Marseillaise d'une voix forte et vibrante si bien que ses bourreaux sont obligés de le bâillonner pour étouffer son chant. La citation suivante à l'ordre de la Nation lui a été décernée le 20 septembre 1944 : "M. Juge (Marc Roland), commissaire de police de la Sûreté nationale, pour les motifs suivants : fonctionnaire d'élite, doué d'éminentes qualités morales, qui avait toujours fait preuve dans l'exercice de ses fonctions d'un sens élevé du devoir. Arrêté par la Gestapo et condamné à mort, a donné au moment de son exécution un exemple admirable d'héroïsme. Martyr de la Résistance.  Le 24 octobre 1944, des funérailles nationales sont organisées pour lui ainsi que pour le sergent-chef Henri Moreau et pour René Chabrier, commerçant, torturés et exécutés en même temps que lui.