En septembre 1943, le couple de confession juive Jacques Moussafir (né en 1897) et Mathilde Notrica (née en 1903), originaires de l'île de Rhodes, ainsi que leurs deux fils, quittent Paris où ils vivent dans la clandestinité pour gagner le sud de la France et se réfugier à Annot, une petite commune des Basses-Alpes.

Là, d'abord installés dans un hôtel et menacés d'être rapidement repérés, ils font la connaissance du gendarme André Martin (photographie ci-contre confiée à la rédaction par sa fille Muriel - tous droits réservés) qui, sur la base d'un document turc rédigé en caractères arabes (Rhodes a été turque jusqu'en 1912), leur fournit une déclaration sur papier à en-tête de la Gendarmerie, attestant qu'ils sont de "confession musulmane". Cela les préserve momentanément.

Quelques mois plus tard, en février 1944, un collabo dénonce une vingtaine de juifs résidant à Annot. Le gendarme Martin prévient avant la rafle prévue ceux qu'il connaît et il conduit en voiture la famille Moussafir jusqu'au hameau d'Ubraye, un coin perdu dans la montagne où elle se met à l'abri durant quinze jours. André Martin cache également les grands parents Moussafir (venus rejoindre leurs proches) dans un appartement d'Annot.

Par la suite, la famille au grand complet ainsi qu'un couple, les Darmon (soit au total huit personnes ) seront logés clandestinement dans cet appartement d'Annot où la fille du gendarme (la petite Liliane qui a neuf ans à l'époque) apporte à manger en secret. Cela dure des mois, jusqu'à la Libération, mais tout le monde sera sauvé grâce aux bons soins et à la vigilance d'André Martin (qui rejoindra le maquis) et de sa femme Elisabeth qui prendra un temps le relais. Grâce aussi au silence et à la complicité d'une bonne partie des habitants d'Annot comme des collègues du gendarme Martin.